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C’est avec beaucoup de plaisir que je vous présente aujourd’hui Misery, une superbe adaptation de la célèbre nouvelle du roi de l’angoisse, Stephen King. Le Théâtre Hébertot accueille cette magistrale création de Daniel Benoin, plébiscitée à Anthéa Antipolis, scène publique qu’il dirige à Antibes. Ne manquez pas ce véritable chef-d’oeuvre de l’angoisse qui donne lieu à un huis clos délicieusement oppressant, magistralement interprété par Myriam Boyer et Francis Lombrail, en ce moment au Théâtre Hébertot

Un huis clos mettant en exergue le fossé qui se creuse fatalement entre le désir de l’artiste et les habitudes de son public

Le personnage de Paul, tel un double de Stephen King, est un écrivain à gros tirage. Il est à un tournant de sa vie, souhaitant changer de registre, de style, de propos et mettre un terme à l’interminable saga à laquelle il doit son succès. Pour cela il vient de terminer un roman où il fait mourir son héroïne : Misery. Mais un accident de voiture le met à la merci d’Annie, une lectrice psychopathe qui l’admire plus que tout. Elle commence par le sauver, le recueillir, le soigner mais bientôt elle le séquestre avec une rare cruauté et l’oblige à réécrire son roman comme elle l’entend.

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Misery est assurément ma nouvelle préférée du célèbre roi de l’angoisse, Stephen King. Je l’ai lu il y a quelques années maintenant, et le souvenir de cette ambiance oppressante, ainsi que ce récit pétri d’intelligence sont encore présents dans mon esprit. S’il n’est plus à démontrer que Stephen King excelle dans la maîtrise narrative, son génie va plus loin. Il parvient à atteindre une dimension symbolique en décrivant la complexité des rapports entre les êtres humains. En effet, au-delà de l’angoissant personnage d’Annie, se trouve posée, de manière sous-jacente, la question de la création artistique. À qui appartient cette oeuvre une fois achevée et diffusée? Appartient-elle toujours à son auteur ou bien à son public, qui parfois, finit par mieux la connaître que son auteur même? 

Lorsqu’une oeuvre littéraire, musicale ou cinématographique bouleverse son spectateur, au plus profond de son âme, il apparaît alors que la frontière est souvent ténue entre la simple admiration pour l’auteur de l’oeuvre et l’adoration psychotique. Comme le personnage d’Annie l’explique, Misery l’a aidée à vivre, à surmonter ses propres peines, ainsi que la vacuité affective de sa vie, il est donc pour elle, inconcevable que celle-ci puisse mourir. Si l’on est bien entendu choqué par sa folie destructrice et sa cruauté, il n’en reste pas moins que Misery pose la question de la responsabilité de l’auteur s’agissant de son oeuvre. Lorsque l’art parvient à toucher l’âme, il peut, tantôt avoir une action positive, tantôt au contraire, destructrice.

Une interprétation magistrale donnée par Myriam Boyer et Francis Lombrail

Myriam Boyer incarne le personnage d’Annie, elle EST Annie. L’on est tantôt angoissé, mal à l’aise, à cause de sa folie, tantôt, rarement, dans l’empathie, lorsque celle-ci évoque la tristesse et monotonie de sa vie, que seul le personnage fictif de Misery a su égayer quelque peu. Elle évoque le personnage de Misery comme étant un modèle, qui aurait donné un certain sens à sa vie. L’excellente qualité de jeu et l’incroyable présence scénique de cette très talentueuse comédienne n’a rien à envier au jeu de Kathy Bates dans le film de Rob Reiner, Misery (1990).

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Francis Lombrail est quant à lui, tout aussi étonnant dans le rôle de Paul, son interprétation n’a rien à envier non plus à celle de James Caan dans l’adaptation cinématographique de Reiner. On souffre avec lui, l’on ressent sa claustrophobie, à être enfermé de la sorte dans cet endroit suintant l’angoisse. Le malaise est palpable, ce talentueux comédien parvient à nous transmettre l’angoisse de la situation inextricable de son personnage. La scène dans laquelle Annie force Paul à brûler son manuscrit est d’une rare et poignante intensité.

À noter également l’excellente mise en scène avec la projection d’images effrayantes, telles qu’elles apparaissent dans l’esprit de Paul, comme des visions cauchemardesques. Cette mise en scène de Daniel Benoin renforce cette sensation d’enfermement. N’hésitez pas à lire les articles de mes amies et complices, Le petit monde de Natieak ici et Dame Skarlette ici.

misery-mise-en-scenecrédits photos: Nathalie Sternalsky

Ne manquez pas ce chef-d’oeuvre d’angoisse à l’interprétation magistrale, dans le magnifique cadre du Théâtre Hébertot, du mardi au samedi à 21h, et le dimanche à 15h. La pièce dure 1h40. 

Théâtre Hébertot

78 bis boulevard des Batignolles,

75017 Paris

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